
9ème épisode de la saga Godzilla originelle, Les Envahisseurs Attaquent ressemblait bien à un épisode ultime, une salve finale d’un feu d’artifice avec une réunion de monstres qui devait faire rêver les amateurs de Kaiju dans les années 1960. Les Américains l’ont en tout cas compris ainsi, baptisant cette séquelle Destroy All Monsters, avant de recevoir le 10ème épisode et de l’appeler All Monsters Attack, dans une tentative désespérée de faire croire à un ultime coup d’éclat. Mais déjà, là, c’est du lourd.
L’histoire :

En 1999, alors que le « Futur 2000″ est à portée de main, on a bien fait les choses : tout ce qui est monstre géant a été parqué sur une île, « MonsterLand ». Godzilla, Rodan, Anguirus et les autres profitent tout à coup d’une panne suspecte des systèmes de sécurité derniers cri pour se faire la malle et tout bousiller dans les plus grandes métropoles du monde. Une petite enquête est menée, ce serait un coup fourré des Kilaaks, de fourbes extraterrestres.
Autour du Film :
Avant le Godzilla de 2004, c’est celui-ci qui comptait la plus copieuse sélection de monstres dans l’histoire de la franchise, avec 11 bestioles représentées.
Les Envahisseurs Attaquent est la dernière collaboration de ceux que l’on considère comme « les 4 pères de Godzilla », Tanaka à la production, Honda aux manettes, Ifukube à la musique et Tsuburaya aux effets spéciaux. Après ce film, une page se tourne.
Le titre français est la traduction la plus proche du titre original, « L’Invasion des Monstres », c’est en tout cas plus proche que le titre américain, « Destroy All Monsters », même si ce dernier, convenons-en, claque pas mal.
Ce qui a mal vieilli :
- Un scénario qui parle surtout aux habitués
Parce que pour les autres, constater qu’après 10 minutes de film toutes les grandes villes de la planète sont détruites et que l’intrigue peut commencer, c’est un peu brutal. Peut-être que lorsqu’on a vu les 8 premiers Godzilla, ça semble couler de source, pas lorsqu’on découvre ce film à froid. - Des aliens qui peinent à convaincre
Ça parait pourtant logique, dans un film japonais, ce sont aussi des acteurs japonais qui jouent les extraterrestres. Du coup, quand on porte un regard d’occidental sur ce film, on voit plein de Japonais pendant une heure et demi parler anglais, et quand il faut faire apparaître un extra-terrestre venu d’une planète entre Mars et Jupiter, c’est une Japonaise avec une capuche argentée… On se rassure en se disant que les Asiatiques doivent avoir la même impression en voyant les Martiens de Hélium dans John Carter avec des bonnes têtes d’Américains. - Un doublage qui devrait être illégal
Non seulement la synchro est l’œuvre d’une belle équipe de branleurs, mais la nature même des dialogues en anglais laissent entendre que les mecs n’ont jamais vraiment eu le texte original en main : on dirait que chez Titra Studio, le type en charge du dossier vaguement reconstitué une histoire sur la base des images et a improvisé des textes au gré des apparitions de personnages à l’écran. - Un poil trop de maquettes
Et aussi de caméras de surveillance qui font des plans multiples et un montage impeccable quand elles filment les catastrophes pour les retransmettre en direct sur les écrans de contrôle. On veut bien essayer d’adhérer à la « magie du cinéma » et tenter se convaincre du réalisme de ces trucs, mais il faut arrêter de nous prendre pour des cons. Et mettre un peu de moyens dans les effets spéciaux.
3 raisons de le voir quand même :
- L’impression de voir un truc énorme, pour l’époque : la réalisation s’applique à faire cohabiter dans le même plan différents monstres, et on sent que ce n’est pas anodin. On imagine que quelques nerds des années 1960 étaient comme des dingues face à ce Royale Rumble de Kaiju, puisque tout le film tend vers cette grosse scène de chicore entre les monstres terriens et celui venu du cosmos.
- Une baston de monstres épique : un peu décousue peut-être, et un peu dérangeante aussi puisque le monstre envoyé par les aliens hostiles se fait littéralement lyncher par Godzilla, son gamin et ses potes. Les Terriens l’emportent, pas forcément à la loyale, mais l’important, c’est les 3 points.
- Une réalisation curieusement soignée : « curieusement » car vu les moyens techniques mis en œuvre et les quelques yens sollicités pour faire des maquettes décentes, on aurait pu penser que le film serait réalisé à l’arrache, à la Bioman, il n’en est rien, Ishirō Honda prend son boulot à cœur et rend une copie étonnamment moderne, que la couleur met bien en valeur. Bravo à lui.
Regarder Les Envahisseurs Attaquent – Destroy all Monsters :
On ne saurait trop vous conseiller la version japonaise dotée de sous-titres en anglais qu’on trouve sur Archive.
Si vous êtes courageux, enchainez avec la version retapée pour le marché américain (mais on vous encouragera plutôt à trouver du boulot, s’enfiler deux fois le même Godzilla à la suite, ça n’est pas raisonnable).
Fiche artistique :
Kaiju Soshingeki – 1968 (Japon)
réal : Ishirō Honda
avec : Akira Kubo, Jun Tazaki, Yukiko Kobayashi, Yoshio Tsuchiya, Kyôko Ai, Haruo Nakajima