
Faire des pronostics sur ce que sera le monde en 2035, c’est peut être engageant aujourd’hui. En 1936, ça ne coutait pas bien cher. Du coup, on pouvait sans complexe affirmer avoir fait un film prophétique et l’appeler « les Trucs à Venir ». En français, pas plus de mesure, avec Les Mondes Futurs. Ouais. LES mondes. Carrément. Du coup, le film dure un peu, et raconte plein de trucs. Presque trop.
L’histoire :

Une guerre planétaire éclate, s’éternise et renvoie l’humanité à ses grandes heures féodales. Du seigneur de guerre, des armes bricolées et des maladies chelous, le monde va mal. Tout le monde? Non, une poignée d’idéalistes mise encore sur le progrès et tient à bout de bras la civilisation. Pari payant, malgré ces soubresauts, les hommes pourront bientôt passer à l’étape suivante : la Lune (oui, Monsieur).
Autour du Film :
Certains nerds ont noté que la date du journal qui annonce la fin de la guerre correspondait au jour du 100ème anniversaire de H.G. Wells. Pour vous dire que par moment dans le film, on peut se faire un peu chier.
Le bouquin continue les prédictions jusqu’en 2106. Ce qui veut dire qu’on aurait pu avoir « Les Mondes Futurs 2″, si les producteurs de l’époque avaient su y faire.
Un autre film, canadien celui-là, porte le titre H. G. Wells’ The Shape of Things to Come, un titre encore plus fidèle à l’original et daté de 1979. Sauf qu’en dehors du titre, le film n’a aucun rapport avec l’oeuvre originale (mais l’affiche annonce de grandes choses, et les critiques parlent de « jeu d’acteur embarrassant »…)
Ce qui a mal vieilli :
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- Quelques prophéties foirées
C’est le piège quand on veut absolument passer pour un visionnaire, on peut salement se planter. Est-ce que c’était nécessaire de spécifier qu’en 2035, presque tout le monde aura la radio et qu’on pourra sérieusement considérer un voyage sur la Lune ?
- Quelques prophéties foirées
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- Des ellipses narratives étonnantes
Le film décolle quand on apprend qu’une épidémie transforme les humains en créatures errant sans but. On s dit que cette peste métaphorique va être au cœur du récit. Et puis en fait, non, finalement, ça passe, et on n’en parle plus. Passée cette étrange digression, on commence a penser que H.G. Wells a écrit le script au fur et à mesure du tournage. - Une idée datée de la guerre
On se raccroche à sa dernière expérience, et dans l’absolu, on fantasme un peu : la guerre selon HG Wells ressemble un peu à celle qu’on imaginait, enfant, avant que nos grands parents nous la racontent. Une guerre apocalyptique, forcément inutile et mettant les civils en première ligne. - Une vision toute « romaine » du futur
Le film illustre l’étonnant amalgame entre futurisme, fascisme et références à l’antiquité. La conception du retour de la civilisation rappelle l’inquiétante et martiale architecture du Musée d’Art Moderne de Paris. Peut-être que les leaders appelant au début d’une « nouvelle ère » au milieu des années 30, que ce soit en Allemagne ou en Italie, auraient aimé se saper comme ça :
- Des ellipses narratives étonnantes
3 raisons de le voir quand même :
- Ça reste du H.G. Wells : et une vision instructive du futur, héritée d’une époque où l’on ignorait que la technologie se nourrit de la guerre.
- Une longue séquence d’activité industrielle qui laisse entendre que, oui, le projet était pharaonique : Quand un film est vraiment ambitieux, il n’est jamais complètement mauvais.
- C’est l’anti-Metropolis : que Wells ne pouvait pas encadrer. Et encore, il n’avait pas vue la version
salopée« restaurée » bien comme il faut par ce souillon de Giorgio Moroder. Du coup, une vision du futur opposée à celle qui sentait un peu l’idéal nazi ne peut être que rafraîchissante.
Les Mondes Futurs, le film entier en VF :
Fiche artistique :
réal : William Cameron Menzies
avec : Raymond Massey, Edward Chapman, Ralph Richardson